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Fiche 5 : La collecte des sargasses a terre

Decomposition-sargasse-Guadeloupe

Les différentes méthodes de collecte

La grande problématique des échouages des sargasses sur les plages est à la fois environnementale, sanitaire et économique. Depuis 2011, les échouages massifs fragilisent les écosystèmes des plages, affaiblissent les activités touristiques mais posent surtout un réel problème de santé publique. En effet, les gaz de décomposition libérés environ 72h après l’échouage (Hydrogène sulfuré, méthane et gaz d’ammoniac) sont nocifs et corrosifs. Si les outils de prévention se développent, les collectes de sargasses échouées restent nécessaires dans bon nombre d’endroits.

Des brigades vertes sont régulièrement à l’œuvre sur les plages, à l’initiative d’associations de citoyens ou d’institutions. Elles présentent un faible impact environnemental mais un grand risque sanitaire en raison des gaz de décomposition auquel les ramasseurs sont potentiellement très exposés en fonction du délai de ramassage après l’échouage, sans compter la pénibilité de la tâche. Outre les collectes manuelles, de nombreuses techniques de collecte mécaniques ont été développées.

Canneloader
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  • Les caneloader, équipés d’un bras hydraulique mobile sont souvent utilisés. Ils permettent de ramasser une grande quantité d’algues, leur rendement est donc élevé, et leurs roues leur permettent d’accéder à de nombreux endroits sans risque d’envasement ou d’ensablement. Cf photo 1

  • Les pelles mécaniques sont le moyen de ramassage à terre le plus répandu. Leur rendement est bon quel que soit la quantité d’algues échouées, et elles disposent d’un rayon d’action élevé. En revanche, des bennes doivent être présentes sur les sites d’échouages dans la mesure où les pelles n’ont pas de capacité de stockage. Cf photo 2

  • Les râtisseurs tractés sont des machines avec une bonne mobilité, qui offrent un ramassage dit « propre », c’est-à-dire avec un rendu visuel homogène. Sa capacité de stockage reste très limitée, et les échouages doivent être récents. Cf photo 3

  • Les râtisseurs automoteurs ont également un rendement conséquent, pouvant collecter jusqu’à 150 mètres cubes par heure. Leur mobilité est bonne et le bras récolteur de la machine (à la manière des moissonneuses batteuses) prélève peu de sable. Le dispositif nécessite cependant une plage facile d’accès et large pour que la machine puisse œuvrer.
BRIGADE VERTE

Leurs avantages et inconvénients

Face à la quantité d’algues échouées chaque année ou presque dans le bassin caribéen, les collectes mécaniques sont de redoutables alliées. Adaptées en fonction des endroits où les algues doivent être collectées, les collectes mécaniques effectuées dans les délais, c’est-à-dire dans les trois jours après l’échouage, permettent de nettoyer les plages des amas nocifs en décomposition, et de soulager les habitants, et les professionnels du tourisme notamment. Mais les conditions d’utilisation de ces engins sont les suivantes : elles doivent être parfaitement adaptées à la configuration du littoral et à l’intensité des échouages.

Ces techniques de collecte présentent tout de même des inconvénients majeurs : la dégradation des sols et l’accélération de l’érosion de ceux-ci. Les machines volumineuses tassent les sols, quand d’autres prélèvent des quantités astronomiques de sable. Combinés, ces deux facteurs dégradent fortement le littoral, surtout si leur utilisation est répétée et régulière. Il s’agit là d’une difficulté certaine dans la mesure où les échouages ne sont pas réguliers mais aléatoires, généralement très intensifs.

pelle mecanique
Pelle mécanique

Les algues une fois collectées sont la plupart du temps étalées sur une couche d’une dizaine de centimètres d’épaisseur sur des sites d’arrières-plages. Certains sites spécialement prévus à leur stockage existent mais ils sont encore très peu nombreux. Pourtant, ces sites dédiés permettent de stocker les algues qui se décomposeront, sans aucun risque sanitaire ni
environnemental.

Qui les met en place ?

En France, le ramassage des algues échouées sur les plages est de la compétence des maires des communes impactées, c’est dans le cadre de leurs pouvoirs de police générale qu’ils décident de mettre en place ces actions de collecte et de nettoyage, au titre de la salubrité.
Pour les accompagner et les soutenir, les préfectures et les Régions renseignent régulièrement les maires et appuient les communes en assistance technique, en apportant également leur soutien financier et d’éventuels renforts humains.

Ensemble, ils travaillent à la mise en place d’une politique de prise en charge de cette problématique sur le long terme. Après son déplacement en août dernier aux Antilles, le Ministre chargé des Outre-Mer conscient du besoin d’une réponse forte, a annoncé la création prochaine d’un « service public anti-sargasses » qui centralisera les besoins, les moyens, les mesures et les responsabilités. Un opérateur qui permettra une montée en puissance de la réponse opérationnelle et qui devrait voir le jour d’ici à octobre 2022.

Ratisseur
Râtisseur

Au Mexique ou en République Dominicaine par exemple, le ramassage des sargasses reste majoritairement de la gestion des hôtels qui prennent l’initiative de nettoyer les plages pour sauver le tourisme qui est leur principale ressource, mais face à l’ampleur du phénomène, le Mexique via son fond national des désastres naturels, a débloqué près de 14 millions d’euros pour aider aux opérations de nettoyage. Le gouvernement mexicain commence à investir dans les ramassages à plus grande échelle, ces opérations sont diligentées par le secrétariat de l’Environnement et des ressources naturelles.

Enfin, la collaboration avec les réseaux scientifiques est essentielle, notamment depuis le développement des moyens de repérage des sargasses en mer, avec les systèmes d’observation satellitaires qui fournissent en temps réel, les stades d’évolution des algues dans l’océan, et donc permettent d’anticiper les vagues d’échouages. Il s’agit véritablement d’un travail collectif.

Les impacts du ramassage des sargasses

Les sargasses doivent être collectées pour éviter les problèmes liés à leur décomposition. Mais le ramassage n’est pas sans risque, quelle que soit la méthode employée. Les brigades vertes, régulièrement à l’œuvre dans une majeure partie de la Caraïbe sont très exposées aux émanations de gaz des sargasses. Si certaines machines de collecte permettent de limiter cette exposition nocive, de nouveaux problèmes peuvent être mis en exergue. Les engins en action sur la plage, prélèvent une partie du sable en même temps que la collecte des sargasses, accentuant le phénomène d’érosion des plages. Aussi, les allers et venues peuvent dégrader les sites de pontes des tortues marines, sites très sensibles pour la reproduction des espèces concernées. Les techniques de collectes doivent être scrupuleusement sélectionnées selon les critères de protection de la faune et de la flore environnante.

Sources

Nationalgeographic.co.uk
Agence Française de Développement (AFD)
Agencia Nacional de Seguridad Industrial y de Protección al Medio Ambiente (Mexique)
Rapport des Directives techniques et de gestion pour la réponse à la contingence
des sargasses dans les Caraïbes et le Golfe du Mexique (gouvernement des États-Unis du Mexique)
www.gob.mx

martinique.gouv.fr
Marine MARIE-CHARLOTTE, Référente entreprise Pôle déchets et économie circulaire
Ingénieure – collecte et valorisation des algues sargasses
ADEME Guadeloupe – Martinique
France 24