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Fiche 3 : Des satellites d’observation pour anticiper les flux

Le spatial au service de l’étude des sargasses

Mi-novembre 2020, les skippeurs du Vendée Globe ont été surpris sur leur route vers le sud par la présence en grande quantité de bancs de sargasses au large du Cap Vert, une zone inhabituelle pour ces algues. Grâce aux observations satellitaires, des cartes ont été éditées pour leur permettre de tracer de nouvelles routes et de changer de cap. La première observation par satellite remonte à 2011, année à partir de laquelle les premiers grands échouages ont été répertoriés sur les côtes caribéennes et américaines.

Aujourd’hui, les satellites sont surtout de puissants alliés pour observer, parfois avec une résolution d’imagerie pouvant aller jusqu’à une dizaine de mètres par pixels (un petit bateau de tourisme peut donc être visible sur ces images), les sargasses même si elles se trouvent dans les endroits les plus inaccessibles pour l’Homme comme le milieu des océans.

Ces outils sont indispensables pour observer depuis l’espace la formation des bancs et la manière dont ils se déplacent avec les courants et les vents. On révèle par exemple que les radeaux sont souvent de longues structures filamenteuses, alignées avec les courants qui les transportent. A échelle plus petite, donc plus précise, ces mêmes radeaux sont parallèles aux courants venteux. Seule ombre au tableau, les couvertures nuageuses plus ou moins denses peuvent altérer la précision d’observation.

RADEAUX FILAMENTS

La lumière, alliée puissante

Pour ces observations, le procédé technologique est extrêmement poussé et basé sur l’utilisation de la lumière. Les capteurs dits « radiométriques » installés sur les satellites captent les rayons du soleil réfléchis par la surface océanique. Lorsque la lumière du soleil atteint une surface, qu’elle soit marine ou terrestre, une partie de cette lumière est absorbée, tandis que l’autre est réémise vers l’espace, laquelle est alors captée par les satellites.

En l’occurrence, lorsque les rayons lumineux atteignent les eaux limpides de l’océan, les parties rouges et infrarouges de la lumière seront absorbées, et seuls les rayons bleus seront réémis vers l’espace. Lorsque les rayons atteignent des bancs de sargasses, l’inverse se produit. Les rayons bleus sont absorbés et les rayons rouges et infrarouges sont réémis, ces mêmes rayons qui seront captés là encore par les satellites. Plus une zone observée est intensément rouge, plus la présence de sargasses est donc importante cf schéma. C’est en ce sens que la couverture nuageuse peut compromettre l’observation des sargasses, plus elle est dense, moins la lumière passe.

SCHeMA LUMIeRE SARGASSES

Que faire de toutes ces données satellitaires

SPOT, NOAA Aqua, LANDSAT, Sentinel-3, MODIS etc… plusieurs satellites européens et américains travaillent à l’observation des sargasses et fournissent aux scientifiques les images spatiales des bancs de sargasses. En 2026, la République Dominicaine participera également aux efforts d’observation avec son tout premier satellite doté de capteurs haute résolution, qui sera mis en orbite à altitude basse (similaire à celle de la Station Spatiale Internationale).

En France et depuis 2018, la société Collecte Localisation Satellite (CLS est une filiale du Centre National d’Études Spatiales CNES) recoupe ces données et établit un système de surveillance en collaboration avec l’Agence Spatiale Européenne. Cet outil, SAMTool à l’origine destiné aux élus locaux et aux collectivités pour anticiper les vagues d’échouages et les ramassages à terre et en mer, permet aujourd’hui à tous de consulter des cartes éditées quotidiennement (payant) ou hebdomadairement (gratuit) sur les évolutions géographiques des bancs de sargasses, en plus des cartes des dérives prévisionnelles de ces bancs. À noter que L’Université de Floride Sud produit des cartes quotidiennement pour suivre ces algues notamment dans la Caraïbes, les Antilles mais aussi sur le bassin Atlantique.

A échelle côtière donc, ces données sont extrêmement importantes dans la prévision des échouages et l’anticipation des potentiels dommages qu’ils peuvent causer, notamment dans la zone du golfe du Mexique, dans la mer des Caraïbes et l’Atlantique.

Landsat 8
Sentinelle 2

Les autres informations apportées par les satellites

En plus des sargasses et des courants, les satellites apportent de nouvelles informations basées sur l’étude de nouveaux paramètres : la température de l’eau, la turbidité (indicateur de la transparence de l’eau) et la densité de phytoplanctons. Autant d’éléments qui permettent de mieux comprendre les origines, et les conditions propices au développement et au déplacement des radeaux de sargasses. Ces paramètres sont également cartographiés, et les données récoltées permettent notamment d’avoir une vision plus précise des déplacements de sargasses dans l’Océan Atlantique, le bassin caribéen et le golfe du Mexique. Lors d’expéditions marines dont l’objectif est d’étudier les sargasses (comme le navire Anthéa de l’IRD en 2017 dans l’Océan Atlantique), ces cartes sont communiquées avec les navires concernés qui adaptent leur cap pour atteindre les bonnes zones de navigations, en l’occurrence celles où la densité de sargasses est la plus importante. Les scientifiques analysent alors ces données.

Les initiatives

Plusieurs initiatives d’observation, de compréhension et d’étude, et de mise en place d’outils concrets sont menées par les différents acteurs locaux, concernés par les échouages massifs de sargasses.

FORESEA (FOREcasting seasonal Sargassum Events in the Atlantic)

Portée par l’Agence Nationale de la Recherche, la Région Guadeloupe et la collectivité territoriale de Martinique, la proposition de recherche FORESEA vise à faire progresser la compréhension actuelle de l’efflorescence et de la dérive des sargasses dans l’océan ouvert et côtier et d’aider à transférer cette compréhension dans une prévision saisonnière de la quantité de sargasses et de la probabilité d’échouage sur la côte.

SAREDA (SArgassum Evolving Distribution in the Atlantic)

Porté par l’Institut Méditerranéen d’Océanologie (MOI), en collaboration avec le LIS, HYGEOS et AERIS/ICARE, SAREDA est un système d’observation et de suivi des sargasses dans l’Atlantique à partir des données spatiales de l’instrument MODIS de la NASA. L’objectif est le développement et la mise en oeuvre d’une chaîne de traitement pour fournir un nouveau produit de télédétection des sargasses en mer et d’étudier leur variation saisonnière et interannuelle.

Sources

https://www.mio.osupytheas.fr/
Institut Méditerranéen d’Océanologie
Odatis-ocean.fr
Data-terra.org
Sargassum-foresa.cnrs.fr
Aeris-data.fr
IRD

University of South Florida
Université des Antilles
Guadeloupe la 1ère
Ouest France
COP 21
Agence Ibéro-Américaine pour la diffusion de la science et de la Technologie