Site internet réalisé avec le concours de Interreg Caraïbes

Fiche 4 : La rétention et la collecte des sargasses en mer 

La rétention en eaux côtières

Dans les eaux côtières, c’est-à-dire les eaux entre la côte et deux kilomètres au large, les barrages sont le procédé le plus utilisé, du golfe du Mexique aux Antilles Françaises en passant par Sainte Lucie ou la République Dominicaine. Deux types de barrages peuvent être installés : les barrages bloquants ou les barrages déviants. Qu’il s’agisse de l’un ou l’autre, les barrages sont constitués de filets et de flotteurs fixés dans les fonds marins à l’aide de plongeurs professionnels qui renseigneront sur les endroits sensibles et ceux plus propices à l’installation des fixations. Plusieurs entreprises fabriquent ces barrages dont l’expérimentation a confirmé l’utilité : Algeanova, Difope, le Floch Dépollution, Elastec, Cubisystème etc… L’utilisation de ces barrages doit être conforme aux normes environnementales en vigueur dans le pays en question. Au Mexique par exemple, les normes sont très strictes : le barrage ne doit pas être composé de plomb ou de polyester, les substrats doivent être neutres en éléments polluants et les zones d’ancrages sont définies par une autorité compétente liée au Ministère du développement durable. Aussi, la pose des barrages de rétention en quinconce est
recommandée au Mexique, quand en France la pose de barrage n’est pas soumise à une disposition particulière.

Les barrages bloquants retiennent donc les algues sargasses en mer, de sorte que les baies, les plages et les ports ne soient pas envahis lors des échouages massifs. La capacité de rétention de ces barrages peut varier en fonction de leur longueur, certains barrages pouvant mesurer jusqu’à 1300m comme celui installé entre le Vauclin et le François en Martinique.
Les algues retenues par les barrages doivent être collectées auquel cas elles se détérioreront en mer d’une part, en ayant potentiellement un impact environnemental fort, lequel est d’ailleurs mal connu ; et d’autre part leur poids pourrait entraîner une rupture des jupes de contention.

BARRAGE BLOQUANT

Les barrages déviants sont positionnés de sorte qu’ils redirigent les sargasses vers un autre lieu, où la collecte sera plus aisée. Ces barrages nécessitent une bonne connaissance de la configuration locale (courantologie, conditions de houle, vent) et une maîtrise accrue des conditions environnementales pour ne pas rediriger la quantité de sargasses dans une zone sensible, comme d’autres plages non protégées.

Barrage deviant

Les moyens de collecte en eaux côtières

Ces deux formes de barrages présentent certes beaucoup d’avantages, mais plusieurs inconvénients sont aussi à noter. Portée par l’ADEME (l’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie), en collaboration avec la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de Guadeloupe (DEAL), et la Préfecture de la Martinique, une étude cite un « panorama des dispositifs de barrage et de collecte ». Elle rappelle que les ancrages adaptés, les entretiens réguliers et coûteux, et leur faible capacité de survie en cas de phénomènes naturels violents (tempêtes, cyclones, forte houle etc…), font de ces infrastructures des solutions temporaires face à un problème récurrent.

Si le barrage déflecteur (barrage déviant) ne permet en aucun cas la rétention des sargasses, le barrage bloquant doit forcément être associé à une collecte des sargasses. Aussi, plusieurs systèmes de collectes sont là encore possibles.

Généralement, des barges sont employées pour ratisser les sargasses contenues par les barrages bloquants cf photo. Ces bateaux étroits à faible tirant d’eau peuvent naviguer dans des zones peu profondes et sont très manoeuvrables. En fonction de leur taille, leur capacité de stockage diverge, tout comme leur rendement pouvant aller de 8 à 140 mètres cubes (soit près de 35 tonnes). Ce sont les plus grandes barges de collecte qui sont généralement employées pour collecter les sargasses retenues par les barrages, les plus petites pouvant collecter les nappes de sargasses proches des plages. Des porte-outils amphibies peuvent également être employés pour repousser les algues vers des points de collecte, ils sont complémentaires aux autres méthodes de collecte.

Certaines localités comme en Guadeloupe et en Martinique disposent également de petites flottilles de « récolteurs », des barges plus ou moins étroites donc mobiles, munies d’un système de tapis roulant, permettant de récolter une grande quantité d’algues en eaux calmes. Elles sont de manière générale couplées avec une barge benne, qui stocke les algues au fur et à mesure qu’elles sont collectées.

BARGE DE COLLECTE
BARGE-DE-COLLECTE-ALGEANOVA
BARGE-DE-COLLECTE

Pour les îles néerlandaises de Bonaire, de Saint-Eustache et de Saba (au sud de Porto-Rico), la récolte des sargasses en mer est généralement conseillée, mais n’est autorisée qu’avec des barges de collecte, disposant d’un tapis de collecte et d’une capacité de stockage. Aussi, une série de mesures (appels aux plongeurs expérimentés, vérification de la faune à proximité des radeaux d’algues etc…) doivent être appliquées avant la collecte des sargasses en mer par les barges, pour vérifier et préserver la vie marine liée aux radeaux de sargasses.

Comment installer ces barrages ?

Dans les Antilles françaises et la grande majorité de la Caraïbe, les barrages peuvent être posés à l’initiative de différents acteurs, comme les associations de riverains, les mairies, les collectivités, les hôtels etc… et les porteurs des projets doivent solliciter l’autorisation d’occupation de l’espace maritime public. Ainsi, la plupart des états contribuent plus ou moins au financement de projets d’installation de barrages, sur les sites adaptés et étudiés en amont, mise à part en République Dominicaine où les hôtels gèrent via des prestataires, la collecte des sargasses et le nettoyage des plages. Au Mexique, l’État investit de plus en plus dans les initiatives de collecte, mais l’essentiel de l’activité reste gérée par les hôtels. En France, ces éléments sont intégrés dans les plans communaux de sauvegarde, intégrés dans le plan sargasse de 2018.

La pose d’un barrage nécessite la présence de plongeurs professionnels locaux qui connaissent le terrain sur lequel le barrage sera possiblement implanté. En effet, certaines zones présentent plus de fragilités que d’autres, certains fonds marins peuvent être riches en espèces de faune ou de flore fragiles.

Enfin, le partage des données satellitaires permet d’anticiper les zones qui seront prochainement sujettes aux échouages massifs des algues, et donc de placer au mieux les barrages qu’ils soient déviants ou bloquants.

BARGE DE COLLECTE ALGeANOVA
Barge de collecte des sargasses

Sources

ANR (Agence Nationale de Recherche)
ADEME (Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie)
https://www.parc-marin-martinique.fr
Algeanova
Martinique.gouv.fr
Guadeloupe.gouv.fr

www.gob.mx
Marine MARIE-CHARLOTTE, Référente entreprise Pôle déchets et économie circulaire
Ingénieure – collecte et valorisation des algues sargasses
ADEME Guadeloupe – Martinique
Ifremer
Dutch Caribbean Nature Alliance – Prevention and clean-up of sargassum